jeudi 5 décembre 2019

Sainte Cécile

Le récit de la conversion de Valérien forme le cœur de cette belle poésie. Après l'avoir introduite par  une brève envolée lyrique à sa "sainte bien-aimée" (laisse-moi reposer sur ton cœur virginal...), Thérèse commence la narration. Cécile était une dame romaine qui avait vouée sa virginité au Christ. Mais ses parents voulaient la marier à un jeune patricien, nommé Valérien. Celui-ci fit donc célébrer des noces somptueuses, auxquelles Cécile participa de corps mais non de cœur, ne se lassant point de répéter à Dieu sa prière accoutumée: "conserve mon cœur pur". Cette demande fournit matière à Thérèse pour y glisser son thème favori: l'abandon. Car c'est bien cet abandon confiant entre les mains de Dieu qui soutenait la vierge en cette occasion critique. La nuit des noces arriva donc. Une fois Cécile seule avec Valérien, elle lui révéla un secret: un ange du Seigneur veillait sur elle nuit et jour... Il ne permettrait pas qu'il ose en rien attenter à sa pureté! Valérien surprit lui demanda de voir cet ange, ce que Cécile lui promit, si toutefois il consentait auparavant à se faire chrétien en recevant le baptême. Les douces paroles de la vierge et la grâce de Dieu agirent sur le cœur de Valérien qui, sans délai, alla trouver la pape Urbin pour se faire baptiser. Revenant ensuite vers Cécile, il vit auprès d'elle un bel ange qui tenait en ses mains des couronnes de roses et de lys. Cet ange leur en fit comprendre la signification. Les lys symbolisaient la virginité qu'ils devaient conserver, et les roses le martyre qui allait couronner leur front de gloire aux cieux. Ils enfanteront ainsi au Seigneur de nombreuses âmes qui suivront leur admirable exemple. Thérèse achève ici son récit et conclue en priant sa chère sainte de lui donner de convertir comme elle des âmes à Jésus par le sacrifice de sa vie et de ses peines, espérant au soir de son exil terrestre s'envoler auprès d'elle pour lui chanter son amour dans les cieux.

Deux mélodies, plusieurs manuscrits...

 

Pour bien comprendre les différentes versions proposées ci-dessous, il convient de fournir une brève explication. Tout d'abord, Thérèse indique pour ce chant deux mélodies possibles, à savoir un cantique de consécration à la Vierge, "Prends mon cœur, le voilà" et un hymne à l'Eucharistie, "Dieu de paix et d'amour". Le site de Lisieux fournit les partitions de ces deux chants, mais il se trouve qu'il existe pour le premier une autre mélodie, peut-être plus populaire (elle se retrouve dans plusieurs recueils anciens, et également sur internet). J'ai donc choisi de chanter le texte "officiel" de la poésie sur le cantique de consécration à Marie dans ses deux mélodies, intercalées.

Puis, trouvant sur le site des archives de Lisieux le fac-similé de plusieurs manuscrits de Thérèse, je les ai comparés attentivement, et, mettant de côté les petites variantes, j'en ai extrait trois strophes entièrement nouvelles et une quatrième profondément remaniée. Réunissant ces quatre strophes, je les ai ensuite chantées sur la deuxième mélodie, c'est-à-dire l'hymne à l'Eucharistie.

Après les vidéos, trois petits lecteurs audio permettent à un chacun de chanter librement la poésie sur l'une ou l'autre des trois mélodies.

Enfin, après la retranscription des paroles chantées, je place le texte complet des trois manuscrits, en mettant en gras tous les passages qui ont des différences entre eux ou avec le texte officiel des œuvres complètes.

 

Version chantée de cette poésie avec paroles affichées sur l'image :

 



Version chantée des quatre strophes supplémentaires inédites :

 



Version musicale avec les paroles pour accompagner les chanteurs :

 



Version musicale des strophes inédites avec les paroles :

 


 

Couplet musical en boucle pour chacune des mélodies :

 

- Prends mon cœur, le voilà (mélodie populaire) 



- Prends mon cœur, le voilà (mélodie du site de Lisieux) 



- Dieu de paix et d'amour




Paroles intégrales de la poésie :

 

Un vers souligné est un vers modifié par Mère Agnès de Jésus,
utilisé de préférence à l'original de Thérèse (placé ensuite entre crochets).
Les pointillés indiquent un changement de mélodie
(à noter aussi la reprise de la mélodie du refrain à la strophe 26).

1
O Sainte bien-aimée, je contemple ravi(e)
Le sillon lumineux qui demeure après toi ;
Je crois entendre encor ta douce mélodie :
Oui, ton céleste chant arrive jusqu'à moi.

2
De mon âme exilée, écoute la prière :
Laisse-moi reposer sur ton cœur virginal,
Ce lys immaculé qui brilla sur la terre
D'un éclat merveilleux et presque sans égal.

3
O très chaste Colombe, en traversant la vie
Tu ne cherchas jamais d'autre époux que Jésus ;
Ayant choisi ton âme, Il se l'était unie,
La trouvant embaumée de toutes les vertus.

----------

4
Cependant un mortel, radieux de jeunesse,
Respira ton parfum, blanche et céleste fleur !
Afin de te cueillir, de gagner ta tendresse,
Valérien voulut te donner tout son cœur.

5
Bientôt il prépara des noces magnifiques,
Son palais retentit de chants mélodieux...
Mais ton cœur virginal redisait des cantiques
Dont l'écho tout divin s'élevait jusqu'aux Cieux !

6
Que pouvais-tu chanter, si loin de ta Patrie,
Et voyant près de toi ce fragile mortel ?
Sans doute tu voulais abandonner la vie
Et t'unir pour toujours à Jésus dans le Ciel...

----------

7
Mais non... j'entends vibrer ta lyre séraphique,
Lyre de ton amour dont l'accent fut si doux ;
Tu chantais au Seigneur ce sublime cantique :
« Conserve mon cœur pur, Jésus mon tendre Epoux !... »

8
Ineffable abandon ! Divine mélodie !
Tu dévoiles l'amour par ton céleste chant.
L'amour qui ne craint pas, qui s'endort et s'oublie
Sur le Cœur de son Dieu, comme un petit enfant...

9
Dans la voûte azurée parut la blanche étoile
Qui venait éclairer de ses timides feux
La lumineuse nuit qui nous montra sans voile
Le virginal amour des époux dans les Cieux...

----------

10
Alors Valérien rêvait la jouissance,
Cécile, ton amour était tout son désir...
Il trouva le bonheur dans ta noble alliance,
Tu lui montras la vie qui ne doit pas finir.

11
« Jeune ami, lui dis-tu, près de moi toujours veille
Un ange du Seigneur qui garde mon cœur pur ;
Il ne me quitte pas, alors que je sommeille,
Il me couvre avec joie de ses ailes d'azur.

12
La nuit, je vois briller son aimable visage
D'un éclat bien plus doux que les feux du matin ;
Sa face me paraît la transparente image,
Le pur rayonnement du visage divin. »

13
Valérien reprit : « Montre-moi ce bel Ange,
Afin qu'à ton serment je puisse ajouter foi.
Autrement, crains déjà que mon amour se change
En terrible fureur, en haine contre toi... »

14
O Colombe cachée dans le creux de la pierre !
Tu ne redoutais pas les filets du chasseur ;
La Face de Jésus te montrait sa lumière,
L'Evangile sacré reposait sur ton cœur...

----------

15
Tu repris aussitôt avec un doux sourire :
« Mon céleste Gardien exauce ton désir.
Bientôt tu le verras ; il daignera te dire
Que pour voler aux Cieux, tu dois être martyr.

16
Mais avant de le voir, il faut que le baptême
Répande dans ton âme une sainte blancheur ;
Il faut que le vrai Dieu l'habite par Lui-même,
Il faut que l'Esprit-Saint soit la vie de ton cœur.

17
Le Verbe, Fils de Dieu et le Fils de Marie,
Dans son immense amour s'immole sur l'autel ;
Tu dois aller t'asseoir au Banquet de la Vie
Afin de recevoir Jésus le Pain du Ciel.

18
Alors, le Séraphin t'appellera son frère,
Et voyant dans ton cœur le trône de son Dieu,
Il te fera quitter les plages de la terre ;
Tu verras le séjour de cet esprit de feu. »

19
- « Je sens brûler mon cœur d'une nouvelle flamme »
S'écria transporté l'ardent patricien.
[S'écria dans sa joie l'ardent patricien.]
« Je veux que le vrai Dieu habite dans mon âme,
Cécile, mon amour sera digne du tien !... »

----------

20
Revêtu de la robe emblème d'innocence,
Valérien put voir le bel ange des Cieux ;
Il contempla ravi sa sublime puissance,
Il vit le doux éclat de son front radieux.

21
Le brillant séraphin tenait de fraîches roses
Mélangées de beaux lys éclatants de blancheur.
Dans les jardins du Ciel, ces fleurs étaient écloses
Sous les rayons d'amour de l'Astre créateur.

22
« Epoux chéris des Cieux, les roses du martyre
Couronneront vos fronts, dit l'ange du Seigneur ;
Il n'y a pas de voix, il n'y a pas de lyre
Capables de chanter cette grande faveur !

23
Je m'abîme en mon Dieu, je contemple ses charmes,
Mais je ne puis pour Lui m'immoler et souffrir ;
Je ne puis lui donner ni mon sang ni mes larmes ;
Pour dire mon amour, je ne saurais mourir...
[Malgré tout mon amour, je ne saurais mourir...]

24
La pureté, de l'ange est le brillant partage,
Son immense bonheur ne doit jamais finir ;
Mais sur le Séraphin, vous avez l'avantage :
Vous pouvez être purs, et vous pouvez souffrir !... »

----------

25
« De la virginité, vous voyez le symbole
Dans ces lys embaumés que vous envoie l'Agneau ;
Vous serez couronnés de la blanche auréole,
Vous chanterez toujours le cantique nouveau.

26
Votre chaste union enfantera des âmes
Qui ne rechercheront d'autre époux que Jésus ;
Vous les verrez briller comme de pures flammes,
Près du trône divin, au séjour des élus. »

27
Cécile, prête-moi ta douce mélodie :
Je voudrais convertir à Jésus tant de cœurs !
Je voudrais comme toi sacrifier ma vie,
Je voudrais lui donner et mon sang et mes pleurs...

28
Obtiens-moi de goûter sur la rive étrangère
Le parfait abandon, ce doux fruit de l'amour.
O ma Sainte chérie ! bientôt, loin de la terre,
Obtiens-moi de voler près de toi sans retour...


 Texte des quatre strophes complémentaires inédites :

 

Le vers en gras est arrangé pour une suite logique avec la strophe précédente
(l'original est ensuite placé entre crochets).

1
Douce Vierge Cécile, ô ma Sainte chérie,
Que ne puis-je emprunter la voix des bienheureux
Pour te chanter l'amour dont mon âme est remplie !
Que ne puis-je bientôt te contempler aux Cieux !...

2
Beau lys immaculé, tu brillas sur la terre
D'un éclat merveilleux et presque sans égal.
Ah ! laisse-moi chanter sur la rive étrangère,
Ton suave parfum, ton éclat virginal...

3
O très chaste Colombe ! je comprends ton langage :
[De l'ardent Séraphin, je comprends le langage :]
Cécile comme toi, je veux suivre l'Agneau !
Je n'aime que Jésus et je veux sans image,
Oui, je veux contempler en face un Dieu si beau !...

4
O Sainte Bien-Aimée, exauce ma prière !
Je voudrais imiter tes sublimes vertus ;
Je te confie mon âme et ma vie tout entière,
Je te confie mon cœur, guide-le vers Jésus !...



Texte du manuscrit adressé à Céline :

 

Les passages non en gras sont identiques dans tous les manuscrits,
y compris en regard du texte publié dans les œuvres complètes.


La Mélodie de Sainte Cécile

1
Douce Vierge Cécile, ô ma Sainte chérie !
Que ne puis-je emprunter la voix des bienheureux
Pour te chanter l'amour dont mon âme est remplie !
Que ne puis-je bientôt te contempler aux Cieux !...


2
De mon âme exilée, écoute la prière :
Laisse-moi reposer sur ton cœur virginal,
Ce lys immaculé qui brilla sur la terre
D'un éclat merveilleux et presque sans égal.


3
O Sainte Bien-aimée ! je contemple ravie
Le sillon lumineux qui demeure après toi ;
Je crois entendre encor ta douce mélodie...
Oui, ton céleste chant arrive jusqu'à moi !...

4
O très chaste Colombe ! en traversant la vie
Tu ne cherchas jamais d'autre époux que Jésus ;
Ayant choisi ton âme, Il se l'était unie,
La trouvant embaumée de toutes les vertus.

5
Cependant, un mortel, radieux de jeunesse,
Respira ton parfum, blanche et céleste fleur !
Afin de te cueillir, de gagner ta tendresse,
Valérien voulut te donner tout son cœur.

6
Bientôt il prépara des noces magnifiques,
Son palais retentit de chants mélodieux...
Mais ton cœur virginal redisait des cantiques
Dont l'écho tout Divin s'élevait jusqu'aux Cieux !

7
Que pouvais-tu chanter, si loin de ta Patrie,
Et voyant près de toi ce fragile mortel ?
Sans doute tu voulais abandonner la vie
Et t'unir pour toujours à Jésus dans le Ciel.

8
Mais non... j'entends vibrer ta lyre séraphique,
Lyre de ton amour dont l'accent fut si doux ;
Tu chantais au Seigneur ce sublime cantique :
« Conserve mon cœur pur, Jésus mon tendre Epoux. »

9
Ineffable abandon ! Divine mélodie !
Tu dévoiles l'amour par ton Céleste chant,
L'amour qui ne craint pas... qui s'endort et s'oublie
Sur le cœur de son Dieu, comme un petit enfant.

10
Dans la voûte azurée parut la blanche étoile
Qui venait éclairer de ses timides feux
La lumineuse nuit qui nous montra sans voile
Le virginal amour des époux dans les Cieux.

11
Alors Valérien rêvait la jouissance,
Cécile, ton amour était tout son désir.
Il trouva le bonheur dans ta noble alliance,
Tu lui montras la vie qui ne doit pas finir.

12
« Jeune ami (lui dis-tu), près de moi toujours veille
Un ange du Seigneur qui garde mon cœur pur ;
Il ne me quitte pas, alors que je sommeille,
Il me couvre avec joie de ses ailes d'azur...

13
La nuit, je vois briller son aimable visage
D'un éclat bien plus doux que les feux du matin ;
Sa face me paraît la transparente image,
Le pur rayonnement du visage Divin. »

14
Valérien reprit : - « Montre-moi ce bel Ange,
Afin qu'à ton serment je puisse ajouter foi.
Autrement, crains déjà que mon amour se change
En terrible fureur, en haine contre toi... »

15
O Colombe cachée dans le creux de la pierre !
Tu ne redoutais pas les filets du chasseur ;
La Face de Jésus te montrait sa lumière,
L'Evangile sacré reposait sur ton cœur...

16
Tu lui dis aussitôt avec un doux sourire :
- « Mon céleste Gardien exauce ton désir.
Bientôt tu le verras ; il daignera te dire
Que pour voler aux Cieux, tu dois être martyr.

17
Mais avant de le voir, il faut que le Baptême
Répande dans ton âme une sainte blancheur ;
Il faut que le vrai Dieu l'habite par Lui-même,
Il faut que l'Esprit-Saint soit la vie de ton cœur.

18
Jésus le Fils de Dieu et le Fils de Marie
Dans son immense amour s'immole sur l'autel ;
Tu dois aller t'asseoir au Banquet de la Vie
Afin de recevoir Jésus le Pain du Ciel.

19
Alors le Séraphin t'appellera son frère,
Et voyant dans ton cœur le trône de son Dieu,
Il te fera quitter les plages de la terre ;
Tu verras le séjour de cet esprit de feu. »

20
- « Je sens brûler mon cœur d'une nouvelle flamme »
S'écria dans sa joie l'ardent Patricien.
« Je veux que le vrai Dieu habite dans mon âme,
Je veux servir le Christ et devenir chrétien. »

21
Revêtu de la robe emblème d'innocence,
Valérien put voir le bel ange des Cieux ;
Il contempla ravi sa sublime puissance,
Il vit le doux éclat de son front radieux.

22
Le brillant Séraphin tenait de fraîches roses
Mélangées de beaux lys éclatants de blancheur.
Dans les jardins du Ciel, ces fleurs étaient écloses
Sous les rayons d'amour de l'Astre Créateur.

23
-  « Epoux chéris des Cieux, les roses du martyre
Couronneront vos fronts, dit l'ange du Seigneur ;
Il n'y a pas de voix, il n'y a pas de lyre
Capables de chanter cette grande faveur !...

24
Je m'abîme en mon Dieu, je contemple ses charmes !
Mais je ne puis pour Lui m'immoler et souffrir ;
Je ne puis lui donner ni mon sang ni mes larmes ;
Malgré tout mon amour, je ne saurais mourir !

25
La pureté, de l'ange est le brillant partage,
Son immense bonheur ne doit jamais finir ;
Mais sur le Séraphin, vous avez l'avantage :
Vous pouvez être purs, et vous pouvez souffrir !...

26
De la virginité, vous voyez le symbole
Dans ces lys embaumés que vous envoie l'Agneau ;
Vous serez couronnés de la blanche auréole,
Vous chanterez toujours le cantique nouveau.

27
Votre chaste union enfantera des âmes
Qui ne rechercheront d'autre époux que Jésus ;
Vous les verrez briller comme de pures flammes,
Près du Trône Divin, au séjour des élus !... »

28
De l'ardent Séraphin, je comprends le langage :
Cécile comme toi, je veux suivre l'Agneau !
Je n'aime que Jésus et je veux sans image,
Oui, je veux contempler en face un Dieu si beau !...


29
Je voudrais emprunter ta douce mélodie
Afin de convertir à Jésus bien des cœurs ;
Je voudrais comme toi sacrifier ma vie,
Je voudrais Lui donner mon sang avec mes pleurs.

30
O Sainte Bien-Aimée, exauce ma prière !
Je voudrais imiter tes sublimes vertus ;
Je te confie mon âme et ma vie tout entière,
Je te confie mon cœur, guide-le vers Jésus !...


31
Obtiens-moi de goûter sur la rive étrangère
Ton sublime abandon, ce doux fruit de l'amour.
O ma Sainte chérie ! Bientôt, loin de la terre,
Obtiens-moi de voler près de toi sans retour !...



Texte du manuscrit adressé à Roulland :

 

Les passages non en gras sont identiques dans tous les manuscrits,
y compris en regard du texte publié dans les œuvres complètes.


A Sainte Cécile vierge et martyre

1
Douce Vierge Cécile, ô ma Sainte chérie,
Que ne puis-je emprunter la voix des bienheureux
Pour te chanter l'amour dont mon âme est remplie !
Que ne puis-je avec toi, m'envoler jusqu'aux Cieux !...


2
O Sainte bien-aimée ! je contemple ravie
Le sillon lumineux qui demeure après toi ;
Je crois entendre encor ta douce mélodie :
Oui, ton céleste chant arrive jusqu'à moi !...

3
Beau lys immaculé, tu brillas sur la terre
D'un éclat merveilleux et presque sans égal.
Ah ! laisse-moi chanter sur la rive étrangère,
Ton suave parfum, ton éclat virginal...


4
O très chaste Colombe, en traversant la vie
Tu ne cherchas jamais d'autre époux que Jésus ;
Ayant choisi ton âme, Il se l'était unie,
La trouvant embaumée de toutes les vertus.

5
Cependant un mortel, radieux de jeunesse,
Respira ton parfum, blanche et céleste fleur ;
Afin de te cueillir, de gagner ta tendresse,
A toi seule il donna tout l'amour de son cœur.

6
Valérien prépara des noces magnifiques,
Son palais retentit de chants mélodieux ;
Mais ton cœur virginal redisait des cantiques
Dont l'écho tout Divin s'élevait jusqu'aux Cieux.

7
...Que pouvais-tu chanter, si loin de ta Patrie,
Et voyant près de toi un fragile mortel ?...
Sans doute tu voulais abandonner la vie
Et t'unir pour toujours à Jésus dans le Ciel...

8
Mais non... j'entends vibrer ta lyre séraphique,
Lyre de ton amour, dont l'accent fut si doux ;
Tu chantais au Seigneur ce sublime cantique :
« Conserve mon cœur pur, Jésus, mon tendre Epoux ! »

9
...Ineffable abandon !... Divine Mélodie !...
Tu dévoiles l'amour, par ton céleste chant.
L'amour, qui ne craint pas... qui s'endort et s'oublie
Sur le Cœur de son Dieu, comme un petit enfant !...

10
- Dans la voûte azurée parut la blanche étoile
Qui venait éclairer de ses timides feux
La lumineuse nuit qui nous montra sans voile
Le virginal amour des époux dans les Cieux...

11
Valérien ne rêvait alors que jouissance,
Cécile ton amour était tout son désir.
Il trouva plus encor dans ta noble alliance :
Tu lui montras la vie qui ne doit pas finir.

12
- « Jeune ami », lui dis-tu, « près de moi toujours veille
Un ange du Seigneur qui garde mon cœur pur ;
Il ne me quitte pas alors que je sommeille,
Il me couvre avec joie de ses ailes d'azur.

13
La nuit, je vois briller son aimable visage
D'un éclat bien plus doux que les feux du matin.
Sa face me paraît la transparente image,
Le pur rayonnement du Visage Divin. »

14
Valérien répondit : - « Montre-moi ce bel ange
Afin qu'à ton serment je puisse ajouter foi.
Autrement crains déjà que mon amour se change
En terrible fureur... en haine contre toi !!!... »

15
O Colombe cachée dans le creux de la pierre !
Tu ne redoutais pas les filets du chasseur.
La Face de Jésus te montrait sa lumière,
L'Evangile Sacré reposait sur ton cœur...

16
Tu repris aussitôt avec un doux sourire :
- « Mon céleste Gardien exauce ton désir.
Bientôt tu le verras, il daignera te dire
Que pour voler aux Cieux, tu dois être martyr...

17
Mais avant de le voir, il faut que le Baptême
Répande dans ton âme une sainte blancheur ;
Il faut que le vrai Dieu l'habite par Lui-même,
Il faut que l'Esprit-Saint soit la vie de ton cœur.

18
Jésus le Fils de Dieu et le Fils de Marie
Dans son immense amour, s'immole sur l'autel ;
Tu dois aller t'asseoir au Banquet de la Vie
Afin de recevoir Jésus le Pain du Ciel.

19
Alors le Séraphin t'appellera son frère,
Et voyant dans ton cœur le trône de son Dieu,
Il te fera quitter les plages de la terre ;
Tu verras le séjour de cet esprit de feu... »

20
- « Je sens brûler mon cœur d'une nouvelle flamme »
S'écria dans sa joie le jeune Patricien.
« Je veux que le vrai Dieu habite dans mon âme,
Je veux servir le Christ et devenir chrétien. »

21
Bientôt la blanche robe emblème d'innocence
Permit à Valérien de voir l'ange des Cieux.
Il contempla ravi sa sublime puissance,
Il vit le doux éclat de son front radieux.

22
Le brillant séraphin tenait de fraîches roses
Mélangées de beaux lys, éclatants de blancheur ;
Dans les jardins du Ciel, ces fleurs étaient écloses
Sous les rayons d'amour de l'Astre Créateur.

23
-  « Cécile et Valérien, les roses du martyre
Couronneront vos fronts, » dit l'ange du Seigneur ;
Il n'y a pas de voix, il n'y a pas de lyre
Capables de chanter cette grande faveur...

24
Je m'abîme en mon Dieu, je contemple ses charmes,
Mais je ne puis pour lui m'immoler et souffrir ;
Je ne puis lui donner ni mon sang ni mes larmes ;
Malgré tout mon amour, je ne saurais mourir !...

25
La pureté, de l'ange est le brillant partage,
Son immense bonheur ne doit jamais finir ;
Mais sur le séraphin, vous avez l'avantage :
Vous pouvez être purs et vous pouvez souffrir !...

26
De la virginité, vous voyez le symbole
Dans ces lys embaumés que vous envoie l'Agneau ;
Vous serez couronnés de la blanche auréole,
Vous chanterez toujours le cantique nouveau.

27
Votre chaste union enfantera des âmes
Qui ne rechercheront d'autre Epoux que Jésus.
Vous les verrez briller comme de pures flammes
Près de l'Agneau Divin au séjour des élus !... »

28
Cécile, prête-moi ta douce mélodie,
Je voudrais à Jésus convertir bien des cœurs !...
Je voudrais, comme toi, sacrifier ma vie,
Je voudrais Lui donner mon sang avec mes pleurs...

29
O Sainte bien-aimée, exauce ma prière :
Je voudrais imiter tes sublimes vertus ;
Je te confie mon âme et ma vie tout entière,
Je te confie mon cœur, guide-le vers Jésus...



Texte du manuscrit adressé à Bellière :

 

Les passages non en gras sont identiques dans tous les manuscrits,
y compris en regard du texte publié dans les œuvres complètes.


A Sainte Cécile, v. m.

1
Douce Vierge Cécile, ô ma Sainte chérie !
Que ne puis-je emprunter la voix des Bienheureux
Pour te chanter l'amour dont mon âme est remplie.
Que ne puis-je voler avec toi jusqu'aux Cieux !...


2
De mon âme exilée, écoute la prière :
Laisse-moi reposer sur ton cœur virginal,
Ce lys immaculé qui brilla sur la terre
D'un éclat merveilleux et presque sans égal.


3
O Sainte Bien-aimée ! je contemple ravie,
Le sillon lumineux qui demeure après toi ;
Je crois entendre encor ta douce mélodie,
Oui ton céleste chant arrive jusqu'à moi !...

4
O très chaste Colombe ! en traversant la vie
Tu ne cherchas jamais d'autre époux que Jésus ;
Ayant choisi ton âme, il se l'était unie,
La trouvant embaumée de toutes les vertus.

5
Cependant, un mortel, radieux de jeunesse,
Respira ton parfum, blanche et céleste Fleur.
Afin de te cueillir, de gagner ta tendresse,
A toi seule, il donna tout l'amour de son cœur.

6
Bientôt il prépara des noces magnifiques,
Son palais retentit de chants mélodieux ;
Mais ton cœur virginal redisait des cantiques
Dont l'écho tout divin s'élevait jusqu'aux Cieux.

7
Que pouvais-tu chanter si loin de ta patrie
Et voyant près de toi ce fragile mortel ?
Sans doute tu voulais abandonner la vie
Et t'unir pour toujours à Jésus dans le Ciel...

8
Mais non... J'entends vibrer ta lyre séraphique,
Lyre de ton amour dont l'accent fut si doux ;
Tu chantais au Seigneur ce sublime cantique :
« Conserve mon cœur pur, Jésus mon tendre Epoux. »

9
Ineffable abandon ! Divine mélodie !
Tu dévoiles l'amour par ton céleste chant ;
L'amour qui ne craint pas, qui s'endort et s'oublie
Sur le cœur de son Dieu, comme un petit enfant...

10
Dans la voûte azurée parut la blanche étoile
Qui venait éclairer de ses timides feux
La lumineuse nuit qui nous montra sans voile
Le virginal amour des époux dans les Cieux.

11
Alors Valérien rêvait la jouissance,
Cécile, ton amour était tout son désir.
Il trouva plus encor dans ta noble alliance :
Tu lui montras la vie qui ne doit pas finir.

12
«- Jeune ami, lui dis-tu, près de moi toujours veille
Un ange du Seigneur qui garde mon cœur pur ;
Il ne me quitte pas alors que je sommeille,
Il me couvre avec joie de ses ailes d'azur.

13
La nuit je vois briller son aimable visage
D'un éclat bien plus doux que les feux du matin ;
Sa face me paraît la transparente image,
Le pur rayonnement du Visage Divin. »

14
Valérien reprit : - « Montre-moi ce bel ange,
Afin qu'à ton serment je puisse ajouter foi.
Autrement crains déjà que mon amour se change
En terrible fureur, en haine contre toi !... »

15
O Colombe cachée dans le creux de la pierre !
Tu ne redoutais pas les filets du chasseur ;
La Face de Jésus te montrait sa lumière,
L'Evangile sacré reposait sur ton cœur...

16
Tu repris aussitôt, avec un doux sourire :
- « Mon céleste Gardien exauce ton désir.
Bientôt tu le verras, il daignera te dire
Que pour voler [aux] Cieux, tu dois être martyr.

17
Mais avant de le voir, il faut que le Baptême
Répande dans ton âme une sainte blancheur ;
Il faut que le vrai Dieu l'habite par Lui-même,
Il faut que l'Esprit-Saint soit la vie de ton cœur.

18
Jésus le Fils de Dieu et le Fils de Marie
Dans son immense amour s'immole sur l'autel ;
Tu dois aller t'asseoir au banquet de la vie
Afin de recevoir Jésus le Pain du Ciel.

19
Alors le séraphin t'appellera son frère,
Et voyant dans ton cœur le trône de son Dieu,
Il te fera quitter les plages de la terre ;
Tu verras le séjour de cet Esprit de Feu. »

20
- « Je sens brûler mon cœur d'une nouvelle flamme »
S'écria dans sa joie l'ardent patricien.
« Je veux que le Vrai Dieu habite dans mon âme,
Je veux servir le Christ et devenir chrétien. »

21
Revêtu de la robe emblème d'innocence,
Valérien put voir le bel ange des Cieux ;
Il contempla ravi sa sublime puissance,
Il vit le doux éclat de son front radieux.

22
Le brillant séraphin tenait de fraîches roses
Mélangées de beaux lys éclatants de blancheur.
Dans les jardins du ciel ces fleurs étaient écloses
Sous les rayons d'amour de l'Astre Créateur.

23
«- Epoux chéris du Ciel, les roses du Martyre
Couronneront vos fronts, dit l'ange du Seigneur ;
Il n'y a pas de voix, il n'y a pas de lyre
Capables de chanter cette grande faveur !...

24
Je m'abîme en mon Dieu, je contemple ses charmes,
Mais je ne puis pour Lui m'immoler et souffrir ;
Je ne puis Lui donner ni mon sang ni mes larmes ;
Malgré tout mon amour, je ne saurais mourir...

25
La pureté, de l'ange est le brillant partage,
Son immense bonheur ne doit jamais finir ;
Mais sur le séraphin vous avez l'avantage :
Vous pouvez être purs, et vous pouvez souffrir !!!...

26
De la virginité vous voyez le symbole
Dans ces lys embaumés que vous envoie l'Agneau ;
Vous serez couronnés de la blanche auréole,
Vous chanterez toujours le cantique nouveau.

27
Votre chaste union enfantera des âmes
Qui ne rechercheront d'autre époux que Jésus ;
Vous les verrez briller comme de pures flammes,
Près de l'Agneau Divin, au séjour des élus... »

28
De l'ardent séraphin, je comprends le langage :
Cécile, comme toi, je veux suivre l'Agneau !
Je n'aime que Jésus et je veux sans image,
Oui, je veux contempler en face un Dieu si beau.


29
Je voudrais emprunter ta douce mélodie
Afin de convertir à Jésus tous les cœurs ;
Je voudrais comme toi sacrifier ma vie,
Je voudrais Lui donner et mon sang et mes pleurs.

30
O Sainte bien-aimée ! exauce ma prière :
Je voudrais imiter tes sublimes vertus.
Je te confie mon âme et ma vie tout entière,
Daigne guider mon cœur et l'offrir à Jésus.


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